« my youth is yours » Oliver

✿ Dis moi mon p'tit champignon. T'es né ici ou pas ?Tu viens d'où sinon ? T'aimes le coin ou pas du tout ?
Je suis né ici, en effet. Je suis incapable de dire s'il s'agit d'une bonne ou d'une mauvaise chose, en revanche. Tout ce que je sais, c'est que j'y suis né, et j'y vis toujours. Si je devais décrire mon enfance, les premiers mots qui me viendraient à l'esprit seraient alcools, complications, et enfin amour. Oui, il vient en dernier celui-ci. En premier l'alcool. Vous saviez que de nos jours, il est estimé à 6,6 million le nombre d'enfants vivants dans la même maison qu'au moins une personne alcoolique ? Et bien ce fût mon cas. Mon père, il avait tendance à boire, beaucoup. Il s'énervait vite, pour peu de choses, se répétait, et avait des tendances violentes même si il n'a jamais frappé ni moi, ni ma mère. J'ai très vite apprit à me faire discret à partir du moment où je repérais l'odeur de l'alcool. Complications, oui parce que j'ai un QI supérieur à la moyenne, et cela s'est très vite vu. Je n'ai jamais voulu aller en école spécialisée parce que je voulais être comme tous le monde. Mais cela ne s'est pas passé comme cela. Depuis mes dix ans je me fais harceler, et parfois, mes parents ne s'en rendent même pas compte. Mais ce n'est pas plus mal, mon père me tuerait si il savait ma faiblesse. Souvent, j'ai eu la tête dans les toilettes, souvent je me suis fait enfermer dans les vestiaires des garçons, souvent on m'a frappé. Une fois même, et je n'en ai jamais parlé à personne, tout un groupe d'adolescent plus grand que moi du fait que j'ai sauté des classes, m'avaient plaqués au sol et s'étaient amusés à m'inscrire des insultes dans le dos, avec un compas. Ce qui explique que je ne me mette plus torse nu désormais, j'ai toujours les cicatrices. Et le pire, c'est que je parle au passé, mais cela continu, encore aujourd'hui. Maintenant que j'ai à peu près le même âge que les autres personnes de ma classe, on ne m'insulte plus tellement à cause de cela. Mais je suis intelligent, vierge, inexpérimenté en amour, trop intelligent, et j'ai "le culot de marcher en levant le regard". Cela suffit à m'attirer la haine. Pour finir, l'amour, et ça, c'était toujours ma mère qui me l'apportait. Elle était bien la seule d'ailleurs. J'ai énormément de bons souvenirs avec elle, et c'est probablement grâce à elle que je suis toujours dans ce monde. Ouai, l'enfance n'a pas forcément été la meilleure période de ma vie. Mais en y pensant, elle n'a été ni meilleure, ni pire que le reste. Pour conclure, j'ai plus de mauvais que de bons souvenirs ici. Mais ce n'est pas la faute du paysage, donc je suppose que je me plais quand même là où je suis.

✿ T'sais, j'aimerais bien que tu me parles un peu de ta vie. Tu fais quoi de ton temps libre ? Et ton métier c'est quoi ?
J'étudie, et après tout ce que je t'ai déjà dis sur moi, tu dois savoir que j'aime étudier. Vous savez, c'est mon échappatoire. Même si le harcèlement et la solitude sont de plus en plus durs à supporter, j'aime apprendre, j'aime m'instruire. Alors je continu. Je ne sais pas encore ce que je vais faire de toute la matière grise que j'ai en ma possession, mais pour le moment, ce n'est pas important. Je passe également beaucoup de temps dans les lieux culturels. Les musés, les cinémas, les bibliothèques, ... C'est mon domaine, celui où on vient rarement m'embêter, où je peux enfin être tranquille, être moi-même. Tu sais, j'aime aussi beaucoup sortir avec mon chien. Aller dans des lieux magnifiques, marcher en pleine nature, prendre des photos, mais aussi m'occuper de lui à la maison. Il ressemble à un gros nounours, mais ce n'est pas pour autant qu'il faut négliger les soins, bien au contraire. L'avantage à avoir un ours en peluche vivant et grandeur nature, c'est que même seul, déprimé, et exténué par la vie, il vous reste une boule de poil qui vous aime et vous câline lorsqu'elle sent que vous allez mal. Et ça, je ne saurais dire à quel point cela m'a souvent sauvé la vie. Donc oui, mon chien est une passion. Une autre passion que je ne peux ignorer, c'est tout ce qui relève du domaine des geeks. Même si étant donné mon caractère et mes aptitudes, je pourrais également être un nerd. Je suis un fan de comics, de séries, de mangas, de cinéma, de romans, et de jeux-vidéos. De musique également bien sur. J'ai de nombreux produits dérivés d'ailleurs, dans ma chambre. J'ai pour habitude de dormir avec des tee-shirts Star Wars, et des caleçons Harry Potter. (note de l'auteur : non, je ne ferais pas de blague sur la baguette) Mes proches, cela va être rapide, je n'en est pas des masses. J'ai mon père. Mais entre nous, c'est plus querelles sur querelles qu'autre chose.  On ne s'est jamais compris. Du moins, il ne me comprend pas. Moi, je sais qu'il ne veut que m'aider, mais lui ne sait pas s'y prendre. Il aurait voulu avoir un autre enfant. Un garçon. Voilà ce qu'il m'a un jour sortit. Il regrettait que je n'aime pas le sport, que je n'ai pas de petites copines (et si il savait que je n'en aurait jamais ...), que j'aime autant les livres et les études, que je sois plus intelligent que lui. Souvent, il m'a emmener faire des choses rien que nous deux, mais je ne me souviens pas qu'il ne m'est rien qu'une fois emmener faire quelque chose que j'aimais faire. On allait à la pêche, la chasse, à des matchs de football. Je détestais tout cela. Je suis rancunier. Et je n'oublierait jamais le fait qu'il ait avoué vouloir un autre enfant, le fait qu'il ait lui même dit que si il pouvait, il en changerait. Ma mère, j'ai déjà beaucoup parlé d'elle également. Je peux rajouter qu'avec le temps, elle a un petit peu changé. C'est devenue la seule personne à qui je peu parler, même si il y a de nombreuses choses que je ne lui dis pas, évidemment. J'ai beau essayer, je ne comprend pas ce qu'elle peut bien trouver à mon père, mais apparemment elle l'aime, trop pour partir. Je ne la comprend pas du tout à ce sujet, mais je ne lui en veut pas. Parce qu'elle est la seule qui me comprenne, qui m'accepte comme je suis. Elle sait d'ailleurs que je préfère les hommes, et elle s'en fiche. L'important pour elle c'est que je sois heureux. Ah, ben si elle savait. Il y a une dernière personne... Tu savais que la majeur partie des gens avouent que leur premier amour était destiné à une personne plus vieille qu'eux ? Nathan. Ah, Nathan. Si je pouvais revenir dans le passé, soit j'irais à l'époque de Leonard De Vinci pour lui dire que ses engins volants allaient révolutionner l'histoire de l'aéronautique, soit j'irais six mois en arrière pour ne jamais avoir rencontré Nathan. Parce que Nathan, c'est tout ce que je ne pourrais jamais être : charismatique, fort, sexy, populaire, tombeur, expérimenté, mais aussi tout ce que je ne pourrais jamais atteindre : hétéro -du moins je le pense vu toutes les femmes qui passent dans son lit-, âgé, et tout simplement trop parfait pour vouloir de moi. Et pourtant je l'aime. Je l'ai rencontré lors d'un cours de Baseball. Je ne pourrais jamais oublier cette date, c'était il y a cinq mois désormais, le 13 janvier 2017, à quatorze heure trente-trois, il faisait douze degrés. Je déteste le sport, mais mon père m'avait forcé à y aller, disant que si j'y mettais du miens, alors j'aimerais. Ce ne fût pas le cas. Et pourtant, je continus encore aujourd'hui d'y aller. Parce que pour rien au monde je ne raterais la vue que cela m'offre. Nathan, prof de Baseball. Mon dieu, qu'il soit maudit pour être tombé sous le charme aussi facilement. Mais il était tellement... Tellement... Parfait. Oui, c'est cela. Et le pire c'est que plus le temps passe, plus nous devenons ce que je pense pouvoir à peu près qualifier d'amis. Ou alors c'est juste une relation prof-élève que je ne sais pas différencier. Il me donne des surnoms, il m'a même proposé des cours particuliers en voyant à quel point j'étais nul, et j'ai accepté. Je ne lui ai jamais dit mon âge réel. Et il ne me l'a jamais demandé, non plus. Je sais qu'il m'appelle "Gamin" parfois, et je le dispute toujours lorsqu'il le fait, donc il doit penser que je suis au minimum majeur. C'est mieux ainsi. Enfin, de toute manière, ce n'est pas comme si j'avais la moindre chance, non plus. Ce qui me gêne le plus, c'est que je suis un adolescent, qui a des hormones, et mon crush sur Nathan n'échappe pas à ces derniers. Comment je suis censé le regarder dans les yeux alors que je rêve de lui pratiquement toutes les nuits...

✿ J'suis pas psy mais bon, si t'as besoin, tu peux tout me raconter. J'suis commère. Tu le sais ?
J'ai déjà parlé de mon enfance, honnêtement, je n'ai pas tellement l'envie de revenir dessus. Je sais que tu n'as pas ma mémoire eidétique, mais tu dois au moins te souvenir du gros de la chose, donc pas besoin de rappel. Je ne parlerais pas non plus de l'école et du harcèlement, vous avez saisit. En revanche je peux parler de Joshua et Philipp. Les deux seuls petits-amis que j'ai jamais eu. Ceux, également, qui ont le plus accentué à mon manque de confiance en moi. Cela n'a pas duré longtemps, pour l'un comme pour l'autre. Joshua avait dix-sept ans, j'en avais quinze. La seule raison pour laquelle j'avais accepté ses avances, était que aussi longtemps où j'étais avec lui, j'étais protégé de ceux qui me faisaient quotidiennement du mal. C'était ma seule motivation, car au fond, je ne pouvais pas supporter sa personnalité. Il était possessif, me rabaissais toujours, et un jour c'est juste allé trop loin. Nous étions seuls dans un vestiaire après un cours de sports, et il ma forcé à me mettre à genoux. Au moment où j'ai compris ce qu'il voulait que je fasse, je me suis levé et me suis enfui en courant. Je n'étais pas prêt à cela. Mais le pire fût les semaines suivantes. Parce qu'évidemment, il avait préparé une vengeance au cas où je réagissais comme je l'avais fais. Et pendant trois mois, j'ai dû supporter de voir une photo de moi agenouillé devant lui circuler dans toute l'école. Au point que les professeurs m'ont mis en colle sans chercher vraiment à comprendre et j'ai dû les supplier de ne pas prévenir mes parents. Je me suis fais traiter de tous les noms jusqu'à la fin de l'année, sans parler des insultes et des remarques à consonances sexuelles que parfois je ne comprenais même pas.  Puis, il y a eu Philipp, plus récent. Je l'ai rencontré en cours de Sociologie. J'avais seize ans et étais en deuxième année d'études à l'université. Lui, avait dix-sept ans. J'ai essayé de me convaincre que je l'aimais, que j'avais des sentiments, parce que je ne voulais plus être le seul à ne jamais être tombé amoureux, parce que j'avais besoin de quelqu'un, d'une aide, d'une protection. Mais c'était faux. Tout ce que je ressentais était faux, ce n'était qu'un voile que je ne m'étais crée pour me berner moi-même. J'ai bien mis six bons mois avant de me rendre compte de ce qu'il se passait. Evidemment que quelqu'un de populaire et beau comme lui ne pouvait pas m'aimer. En vérité, il sortait en même temps avec un grand nombre de fille comme de garçons, et je n'étais qu'un sur la liste parmi tant d'autres. Lui, il n'aimait pas pour les sentiments, il aimait pour les plaisirs charnels. Et moi, je n'ai jamais accepté d'aller jusqu'au bout des choses si tu vois ce que je veux dire. Un jour, environs deux semaines après que j'ai appris la vérité à son sujet, il s'est lassé, et m'a laissé tomber. Aujourd'hui encore, ces deux expériences m'ont laissées un arrière-goût amer. Sans cesse je me demande si finalement, je ne devrais pas juste abandonner et donner mon corps au premier passant, si je ne suis bon qu'à cela, si personne ne m'aimera jamais. En plus du harcèlement, c'est eux qui m'ont rendus aussi peu sûr de moi, aussi peu confiant.